Aimé
raconte......Retour à Fulpmes.....
Fulpmes,(Autriche1948-1949)ll
neige, les melezes frissonnent, la tempete n'est pas loin, c'est
un dimanche
et nous sortons de la petite gare emmitouflès
avec des gros gants et des gros bonnets nous nous dirigeons vers le lycée
par petits groupes, le soir tombe, la lune eclaire la montagne.
Le lycée, masse sombre mais sans austerité se dresse devant
nous avec sa belle architecture ; nous venons de passer le dimanche chez
nos parents à Innsbruck et meme plus loin, et il y a chez tous
un leger serrement de coeur mais qui s'estompe tres vite quand nous penetrons
dans le hall et dans le grand escalier ou nous retrouvons tous ces visages
connus, et tellement joyeux.
Les surveillants sont là à nous attendre, nous avons avec
certains d'entre eux une grande connivence.
Pour moi le retour s'est effectué en fin d'apres midi jusqu'à Innsbruck
dans un de ces grands trains rapides internationaux de la compagnie des
wagons lit et des grands express europeens que j'aimais tant. On y croisait
des militaires de toutes nationalites et notamment des G'IS et des officiers
americains tres impressionnants dans leurs uniformes vert olive.
Il y regnait une atmosphere en dehors du reel, on le sentait bien, malgré notre
jeune age.
C'etait une etrange époque,
surtout dans ces lieux.
Qui a connu le Tyrol et le Vorarlberg pendant la periode precedant immediatement
les annees cinquante a connu un autre monde.
Une espece d'ivresse soulevait les coeurs, nous sortions d'un gouffre
et soudain la liberté reconquise dans un monde qui semblait fait
pour nous et avec qui nous etions en osmose peut etre à cause
du pays, peut etre à cause du lycee, les deux surement.
Le lendemain lundi helas, il y avait le cours de physique et je ne brillai
pas du tout dans les matieres scientifiques. Une espece de terreur
s'emparait de moi quand je penetrai dans cette classe où je
voyais des signes esoteriques au tableau auxquels bien sur je ne comprenais
rien, mais essayai je vraiment de comprendre ?
Je regardai les melezes sous
la neige en esperant ne pas etre interrogé et
je pensai à la recreation qui n'allait pas tarder et au cours
d'allemand qui suivrait et qui me consolerait peut etre de mes deboires.
La recreation n'etait pas une
recreation comme les autres a Fulpmes nous ignorions le bizutage,
pourtant tres
en vogue dans ces années
là. Il y avait
comme partout des poursuites, des eclats de rire, des jeux, des plaisanteries
parfois assez sommaires mais il y regnait en permanence une grande camaraderie
une solidarité et du respect pour chacun d''entre nous.
Etait-ce le depaysement ? la presence des filles ? le decor : ces immenses
et magnifiques montagnes qui nous entouraient et nous eloignaient de la mediocrité.
Pour moi qui venait des plaines de la Garonne et de ses peupliers frissonnants
ce depaysement etait total.
Nos professeurs etaient admirables, il y avait chez la plupart une passion
pour cette experience que nous vivions tous ensemble, je ne l'ai pas
retrouvé plus tard ou la monotonie s'emparait vite des eleves
car il ne se passait jamais rien.
Fulpmes reste gravé à jamais
dans nos memoires
.
Ce lycee si attachant , si dynamique plein de joie de vivre, nous ne
pouvons l'oublier, il nous a accompagné tout au long de notre
vie, sans que nous en ayons conscience, car il est si facile de faire
revivre ces instants, de les évoquer que cela prouve qu'il a laissé chez
chacun dentre nous une trace indelebile.
On ne sortait pas indemne de Fulpmes et c'etait je crois le but poursuivi.
Il n'y a qu'a relire le discours de Monsieur Thibaut Chabaud du 6 juillet
1950 pour s'en convaincre.
Avec de tels atouts, peut-etre nous a t il ete donne de traverser la
vie plus facilement qu'a d'autres ?
Il ne faut pas laisser deperir cette si enrichissantee experience
Mais ceci est une autre histoire....